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🎬 Épisode 3 – L’indemnitĂ© spĂ©cifique de rupture conventionnelle

  • Photo du rĂ©dacteur: SASD
    SASD
  • 17 sept.
  • 7 min de lecture

DerniĂšre mise Ă  jour : 19 sept.


Introduction : Qu'est-ce que l'indemnité de rupture conventionnelle ?


L'indemnité spécifique de rupture conventionnelle est la somme d'argent que vous percevez lorsque vous mettez fin à votre contrat de travail d'un commun accord avec votre employeur. Son montant est le fruit d'une négociation entre les deux parties. Cependant, cette négociation n'est pas totalement libre : la loi impose un montant minimum obligatoire pour protéger le salarié. C'est l'article L 1237-13 du Code du travail qui fixe cette rÚgle fondamentale, en établissant un lien direct avec l'indemnité légale de licenciement. Pour bien comprendre votre droit, il est donc essentiel de maßtriser le calcul de ce plancher minimum.

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1. Le Principe Fondamental : L'Indemnité Légale de Licenciement comme Plancher Minimum

La rĂšgle de base, inscrite dans l'article L 1237-13 du Code du travail, est simple et claire : l'indemnitĂ© de rupture conventionnelle ne peut jamais ĂȘtre infĂ©rieure Ă  l'indemnitĂ© que vous auriez touchĂ©e si vous aviez Ă©tĂ© licenciĂ©(e). C'est le socle de toute nĂ©gociation.


Le montant de votre indemnitĂ© de rupture conventionnelle doit ĂȘtre, au minimum, Ă©gal Ă  celui que vous auriez touchĂ© en cas de licenciement.


La formule de calcul de l’indemnitĂ© lĂ©gale de licenciement (Code du travail, art. R1234-2) est la suivante :


đŸ”č Condition prĂ©alable :

  • Avoir au moins 8 mois d’anciennetĂ© ininterrompue dans l’entreprise (CDI).

  • Ne pas avoir Ă©tĂ© licenciĂ© pour faute grave ou faute lourde.


📌 Formule de calcul

  • ÂŒ de mois de salaire brut par annĂ©e d’anciennetĂ© pour les 10 premiĂšres annĂ©es.

  • ⅓ de mois de salaire brut par annĂ©e d’anciennetĂ© Ă  partir de la 11ᔉ annĂ©e.


📌 Salaire de rĂ©fĂ©rence

Le salaire brut de référence est le plus favorable entre :

  1. La moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant le licenciement (primes incluses),

  2. La moyenne mensuelle des 3 derniers mois (en y intégrant prorata les primes ou gratifications annuelles).


👉 Exemple rapide : Un salariĂ© avec 12 ans d’anciennetĂ© et un salaire de rĂ©fĂ©rence de 2 000 € brut/mois :

  • 10 premiĂšres annĂ©es : 10 × ÂŒ × 2 000 = 5 000 €

  • 2 annĂ©es suivantes : 2 × ⅓ × 2 000 = 1 333 €

  • âžĄïž IndemnitĂ© lĂ©gale = 6 333 €


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Il est crucial de comprendre que la rĂ©fĂ©rence est bien l'indemnitĂ© lĂ©gale de licenciement de droit commun. Par exemple, la Cour de cassation a jugĂ© (Cass. soc. 3-6-2015) que mĂȘme les journalistes, qui bĂ©nĂ©ficient d'une indemnitĂ© lĂ©gale de licenciement spĂ©cifique normalement plus Ă©levĂ©e, doivent se baser sur l'indemnitĂ© lĂ©gale de droit commun pour le calcul du minimum de la rupture conventionnelle. Cela signifie que le plancher de la rupture conventionnelle ignore les rĂ©gimes lĂ©gaux spĂ©cifiques plus favorables.


Ce plancher légal n'est cependant qu'une premiÚre étape, car votre convention collective peut prévoir des dispositions plus favorables.

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2. L'Impact de votre Convention Collective : Un Plancher Souvent Plus ÉlevĂ©


Si votre convention collective prévoit une indemnité de licenciement d'un montant supérieur à l'indemnité légale, c'est ce montant, plus avantageux pour vous, qui devient le nouveau plancher minimum obligatoire pour votre indemnité de rupture conventionnelle.


Suite à un avenant du 18 mai 2009, cette obligation s'applique à la grande majorité des employeurs. Toutefois, il faut savoir que certains secteurs peuvent y échapper, notamment l'agriculture, les professions libérales, la presse ou encore le secteur associatif.

Le tableau ci-dessous synthétise les deux planchers possibles :

Situation du salarié

Montant minimum de l'indemnité

La convention collective ne prévoit rien ou un montant inférieur à l'indemnité légale.

L'indemnité légale de licenciement.

La convention collective prévoit une indemnité de licenciement supérieure à l'indemnité légale.

L'indemnité conventionnelle de licenciement.

Cas particulier : plusieurs indemnités dans votre convention collective.Si votre convention collective prévoit différentes indemnités (par exemple, une pour motif personnel et une autre, plus élevée, pour motif économique), l'administration (Inst. DGT 2009-25) demande de retenir l'indemnité conventionnelle la plus faible comme plancher minimum, à condition qu'elle reste supérieure au minimum légal.


Conseil d'expert : Attention, il s'agit d'une position administrative destinĂ©e Ă  guider les services de l'État pour l'homologation de votre rupture. Comme le prĂ©cise la source de cette instruction, « la position de l'administration ne prĂ©juge en rien des dĂ©cisions de tribunaux ». Cela signifie que vous conservez un argument solide pour nĂ©gocier un montant basĂ© sur l'indemnitĂ© la plus favorable, et qu'une contestation en justice sur ce point resterait possible.

Maintenant que les planchers minimums sont clairs, voyons comment s'effectue le calcul sur des bases concrĂštes.

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3. Le Calcul en Pratique : Salaire de Référence et Ancienneté


3.1. Déterminer votre salaire de référence

La base de calcul de votre indemnité est identique à celle utilisée pour l'indemnité légale de licenciement. Pour déterminer votre salaire de référence, il faut comparer deux méthodes et retenir la plus avantageuse pour vous (Circ. DGT 2009-5) :

‱ Soit la moyenne des 12 derniers salaires bruts mensuels prĂ©cĂ©dant la date de signature de la convention.

‱ Soit la moyenne des 3 derniers salaires bruts mensuels prĂ©cĂ©dant la date de signature de la convention.

Attention, si vous avez perçu des primes ou des sommes Ă  caractĂšre exceptionnel durant cette pĂ©riode, elles doivent ĂȘtre intĂ©grĂ©es au calcul mais lissĂ©es au prorata pour ne pas fausser la moyenne.


3.2. Calculer votre ancienneté


La rĂšgle est cruciale : l'anciennetĂ© Ă  prendre en compte est celle que vous aurez acquise Ă  la date prĂ©vue de la rupture effective de votre contrat, et non Ă  la date de la signature de la convention (Cons. prud'h. Bobigny 6-4-2010). Il est Ă©galement essentiel de souligner que les annĂ©es incomplĂštes doivent ĂȘtre prises en compte dans le calcul de l'indemnitĂ©.


Point de vigilance : le décalage entre la signature et la rupture effective

Un dĂ©lai s'Ă©coule toujours entre la signature de la convention et la date de fin de votre contrat. Or, les calculs du salaire de rĂ©fĂ©rence et de l'anciennetĂ© sont basĂ©s sur des chiffres arrĂȘtĂ©s au moment de la signature, mais qui doivent ĂȘtre valides Ă  la date de rupture. La circulaire administrative (Circ. DGT 2009-5) est trĂšs claire sur ce point : il vous revient, en tant que salariĂ©, de vĂ©rifier que les salaires que vous percevrez entre la signature et la rupture effective ne modifient pas en votre dĂ©faveur la base de calcul de l'indemnitĂ©. Par exemple, une baisse de la partie variable de votre rĂ©munĂ©ration durant cette pĂ©riode pourrait rendre le calcul initial erronĂ©. Soyez donc particuliĂšrement attentif Ă  ce point de contrĂŽle.

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4. Les Cas Particuliers Ă  ConnaĂźtre


4.1. Vous avez moins d'un an d'ancienneté


La situation des salariés ayant moins d'un an d'ancienneté est complexe et a fait l'objet d'interprétations divergentes. Une cour d'appel a pu considérer qu'une indemnité nulle était possible (CA Montpellier 1-6-2011), une décision jugée « étonnante » car la loi prévoit bien une indemnité.


Face Ă  cette incertitude, la pratique Ă  retenir est celle recommandĂ©e par l'administration (Direction GĂ©nĂ©rale du Travail). Selon elle, l'indemnitĂ© est bien due et doit ĂȘtre calculĂ©e au prorata du nombre de mois de prĂ©sence(Circ. DGT 2009-5).


‱ Exemple concret : Pour un salariĂ© avec 7 mois d'anciennetĂ©, le calcul est : (salaire brut mensuel moyen) x (1/4) x (7/12).


Il est à noter que l'administration peut aussi adopter une approche pragmatique : une convention a ainsi été homologuée car l'indemnité négociée était « nettement supérieure » à l'indemnité légale (qui aurait été de zéro), sans suivre un calcul au prorata strict (Cons. prud'h. Le Havre 30-10-2008).


4.2. Vous avez travaillé à temps plein et à temps partiel


Si votre carriĂšre dans l'entreprise a alternĂ© des pĂ©riodes de travail Ă  temps plein et Ă  temps partiel, le calcul de l'indemnitĂ© doit en tenir compte. Il doit ĂȘtre effectuĂ© proportionnellement Ă  ces diffĂ©rentes pĂ©riodes, en suivant les mĂȘmes rĂšgles que pour le calcul de l'indemnitĂ© lĂ©gale de licenciement (Cons. prud'h. Valence 6-11-2008).


4.3. Que se passe-t-il si l'indemnité versée est inférieure au minimum ?


Si, aprÚs vérification, vous constatez que l'indemnité proposée ou versée est inférieure au minimum légal ou conventionnel, quelles sont les conséquences ? La Cour de cassation (Cass. soc. 8-7-2015) a clarifié plusieurs points :

‱ La rupture n'est pas automatiquement annulĂ©e. Le simple fait que le montant soit insuffisant ne suffit pas Ă  invalider la convention.

‱ Vous pouvez rĂ©clamer un complĂ©ment. Vous ĂȘtes en droit de saisir le juge pour obtenir le versement de la diffĂ©rence qui vous est due.

‱ L'annulation pour ce seul motif est difficile. Pour faire annuler la convention sur cette base, il faudrait prouver que votre consentement a Ă©tĂ© viciĂ© ou qu'il y a eu une fraude, ce qui est complexe Ă  dĂ©montrer.


Point de vigilance : Cependant, l'annulation n'est pas impossible. Une cour d'appel (CA Toulouse 29-6-2012) a jugĂ© qu'une convention prĂ©voyant une indemnitĂ© infĂ©rieure au plancher n'aurait jamais dĂ» ĂȘtre homologuĂ©e par l'administration. Elle a donc annulĂ© la rupture et l'a requalifiĂ©e en licenciement sans cause rĂ©elle et sĂ©rieuse, ce qui ouvre droit Ă  des dommages et intĂ©rĂȘts bien plus importants pour le salariĂ©. Cette dĂ©cision montre qu'une contestation peut aboutir, mĂȘme si la voie principale reste la demande d'un complĂ©ment d'indemnitĂ©.

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5. SynthÚse : Les 3 Points Clés à Vérifier

Avant de signer une convention de rupture, il est impératif de vous assurer que vos droits sont respectés. En vous basant sur les éléments de ce guide, concentrez votre attention sur les trois points de contrÎle suivants :

1. VĂ©rifiez le plancher minimum : Votre indemnitĂ© ne peut jamais ĂȘtre infĂ©rieure Ă  l'indemnitĂ© lĂ©gale de licenciement. C'est le socle non nĂ©gociable.

2. Consultez votre convention collective : Si elle prévoit une indemnité de licenciement plus élevée, c'est ce montant qui devient votre nouveau plancher minimum. Ne passez pas à cÎté de ce droit.

3. ContrÎlez le calcul final : Assurez-vous que l'ancienneté est bien calculée jusqu'à la date de fin effective de votre contrat et que le salaire de référence retenu est le plus avantageux pour vous (moyenne sur les 3 ou les 12 derniers mois). Surtout, vérifiez que les salaires perçus aprÚs la signature ne viennent pas diminuer cette base de calcul.

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