Dernière mise à jour : 19 sept.
Introduction : Démystifier l'Entretien
L'entretien de rupture conventionnelle n'est pas une convocation formelle ou un face-à-face intimidant. Il s'agit simplement d'un ou plusieurs échanges entre vous et votre employeur pour discuter des conditions d'une fin de contrat de travail à l'amiable. L'objectif principal est de s'assurer que cette décision est le fruit d'un véritable accord mutuel, pris de manière libre et éclairée par les deux parties.
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1. Comprendre le Cadre de l'Entretien : Flexibilité et Obligations
1.1. Qui peut initier la discussion ?
La proposition de rupture conventionnelle peut venir aussi bien de vous, le salarié, que de votre employeur. La loi ne privilégie aucune des deux parties pour entamer les pourparlers. Il est important de noter qu'une discussion en vue d'une rupture conventionnelle peut parfois émerger d'une situation qui avait débuté comme une procédure de licenciement.
1.2. Comment l'entretien est-il organisé ?
La procédure est volontairement souple pour favoriser le dialogue. Cette flexibilité est acceptable précisément parce que la loi prévoit par ailleurs des garanties solides pour s'assurer que votre consentement reste libre et éclairé. Voici ce que cela signifie concrètement :
• La convocation : Il n'y a aucune obligation légale pour l'employeur d'envoyer une convocation écrite. Un simple échange verbal pour convenir d'un rendez-vous est tout à fait valable.
• Le lieu : La loi ne fixe aucun lieu obligatoire. Un entretien peut se dérouler dans un bureau, une salle de réunion ou même en dehors de l'entreprise (par exemple, dans un bar, comme l'a déjà validé la jurisprudence) sans que cela n'invalide la rupture.
• Le nombre de rencontres : Un seul entretien est le minimum légalement requis. Cependant, si la négociation le nécessite, plusieurs rencontres peuvent être organisées pour parvenir à un accord complet.
1.3. Quel délai pour se préparer ?
Aucun délai légal n'est imposé entre la proposition de rendez-vous et la date de l'entretien. Cependant, un délai "raisonnable" est une exigence fondamentale pour garantir que votre consentement soit éclairé. La jurisprudence a par exemple jugé qu'une convocation reçue un samedi pour un entretien le lundi suivant était trop courte, car elle ne vous laissait pas le temps matériel de vous organiser.
S'inspirer du délai de 5 jours ouvrables prévu pour un entretien de licenciement est une bonne pratique. Cela vous garantit un temps suffisant pour préparer la discussion et, surtout, trouver une personne pour vous assister. Cette préparation est d'autant plus importante qu'elle vous permet d'exercer votre droit le plus fondamental : celui de vous faire assister durant l'échange.
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2. Votre Droit Essentiel : Vous Faire Assister
2.1. Pourquoi l'assistance est-elle un droit fondamental ?
Le droit de vous faire assister est la principale garantie procédurale prévue par la loi pour assurer un échange équilibré et protéger le caractère libre de votre consentement. L'objectif est de prévenir toute forme de pression et de s'assurer que votre décision est prise en toute connaissance de cause, en rééquilibrant la relation hiérarchique le temps de la négociation. Il ne s'agit pas d'une obligation, mais d'une possibilité qui vous est offerte et qu'il est fortement recommandé d'utiliser.
2.2. Vos Options pour l'Assistance
Voici les deux options possibles pour choisir la personne qui vous accompagnera.
Type d'Assistant | Description et Conditions |
Une personne de l'entreprise | Vous pouvez choisir n'importe quel autre salarié de l'entreprise pour vous accompagner. Il peut s'agir d'un collègue, d'un représentant du personnel, ou même, comme l'a confirmé la jurisprudence, de votre supérieur hiérarchique. |
Un conseiller extérieur | Cette option est uniquement disponible si votre entreprise ne dispose pas d'institutions représentatives du personnel(comme un CSE). La liste officielle de ces conseillers est disponible auprès de la DREETS (Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités). |
2.3. Qui ne peut PAS vous assister ?
Il est essentiel de noter qu'un avocat ne peut pas jouer le rôle d'assistant lors de cet ou ces entretiens. Cette possibilité a été explicitement écartée par le législateur. Une nuance existe toutefois : si l'entreprise qui engage la procédure est un cabinet d'avocats, un avocat salarié de ce cabinet devrait pouvoir se faire assister par un de ses collègues.
2.4. Comment informer votre employeur ?
Si vous décidez de vous faire assister, vous devez simplement en informer votre employeur. La loi n'impose ni délai ni forme particulière pour cette information (un email, un courrier ou une annonce verbale suffisent). Le fait d'exercer ce droit ouvre également une possibilité d'assistance pour votre employeur, mais de manière très encadrée.
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3. Le Rôle de l'Employeur et Vos Garanties
3.1. L'assistance de l'employeur : une possibilité conditionnée
La règle est simple : votre employeur ne peut se faire assister que si vous avez vous-même décidé de l'être. Si vous venez seul à l'entretien, votre employeur doit en faire de même. Cette règle existe pour maintenir un équilibre procédural ; l'employeur ne peut pas amener de renfort si vous n'avez pas choisi de le faire en premier.
S'il décide d'être assisté (parce que vous l'êtes), il doit vous en informer et peut choisir :
• Une personne appartenant au personnel de l'entreprise.
• Dans les entreprises de moins de 50 salariés : une personne de son organisation syndicale d'employeurs ou un autre employeur de la même branche.
3.2. L'obligation d'information de l'employeur
Pour garantir votre consentement éclairé, l'employeur a le devoir de vous fournir des informations essentielles durant les échanges.
• Votre droit à l'assistance : L'employeur a l'obligation de vous informer que vous pouvez être assisté. Si cet oubli n'annule pas automatiquement la rupture, il constitue une faute. Vous pourriez obtenir l'annulation de la convention si vous démontrez que cette absence d'information a vicié votre consentement et vous a porté préjudice.
• La possibilité de contacter les services de l'emploi : L'employeur doit vous informer que vous pouvez prendre contact avec les services publics de l'emploi (France Travail, ex-Pôle Emploi) pour préparer la suite de votre parcours. Là encore, l'oubli de cette information n'est sanctionné que si vous prouvez qu'il a affecté votre décision. Par exemple, la justice a jugé que le consentement d'un salarié qui avait déjà un projet de création d'entreprise n'avait pas été vicié par cet oubli.
• Exigez un vrai dialogue : L'entretien n'est pas une simple formalité de signature. La loi impose un véritable échange sur les conditions de la rupture. Une procédure précipitée où la discussion est impossible peut être un motif d'annulation pour vice du consentement.
Connaître le cadre légal et vos garanties est la première étape. La checklist suivante vous aidera à vous préparer sereinement pour passer à l'action.
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4. En Résumé : Votre Checklist Avant l'Entretien
• [ ] Ai-je bien compris que cet entretien est une négociation et non une obligation de signer ?
• [ ] Le délai proposé pour la rencontre me semble-t-il raisonnable pour me préparer ?
• [ ] Ai-je décidé si je souhaite me faire assister ?
• [ ] Si oui, ai-je identifié la personne (collègue ou conseiller) et ai-je prévenu mon employeur ?
• [ ] Ai-je commencé à réfléchir aux conditions de la rupture (date de départ, montant de l'indemnité) ?
• [ ] Suis-je au clair sur le fait que mon consentement doit être libre, sans pression ?

